11 sept. 2013

Si on n'aime pas une bière, c'est souvent de notre faute...

C'est un grand moment de dégustation. Paul a reçu une bouteille d'un supposé "Grand Cru" d'un ami revenant de Californie et c'est aujourd'hui qu'il la débouche. Avec des amis, il la dégustera dans la joie et l'allégresse. Du moins, c'est ce qu'il avait prévu faire. Voyez-vous... une fois les lèvres plongées dans le liquide, il devient immédiatement perplexe. Une, deux, trois petites gorgées chacun, puis c'est l'hécatombe dans le groupe. "Bien moi, elle me déçoit vraiment"... "Elle est bof, mais sans plus"... "En tout cas, elle n'est pas aussi bonne que X"..."C'est la première fois que j'y goûte, mais je ne comprends vraiment pas ce que les autres y trouvent??"... Des répliques qui s'empresseront de se retrouver sur un forum internet, bien évidemment.


La bière en bouteille est fragile, c'est bien connu. Outre le travail de la brasserie (brassage, embouteillage, distribution, etc.) et celui du détaillant (conditions d'entreposage), il reste que le dégustateur de bière demeure plus souvent qu'autrement responsable d'une partie importante de son expérience gustative. Eh oui, c'est souvent de notre faute si on n'aime pas une bière. Et pourquoi donc? Voici quelques pistes qui pourraient aider à trouver la cause de cette insatisfaction:

Est-ce que votre palais était en état d'éveil complet?
En d'autres mots, aviez-vous mangé, ou même bu, quelque chose avant de déguster votre bière qui aurait pu influencer vos perceptions? Idéalement, il faudrait que le palais ait été nettoyé par l'eau et/ou la salive pendant au moins une bonne heure (sinon plus, en cas de repas aux saveurs prononcées) avant une dégustation sérieuse. Certains disent que le meilleur moment d'une journée pour déguster est l'avant-midi. Nous ne sommes pas vraiment d'accord, pour plusieurs raisons, et préférons vous suggérer de déguster lorsque votre salive aura repris le contrôle complet de votre palais et de vos papilles. 

Solution facile: si c'est la première fois que vous dégustez la bière prisée en question, donnez-lui une chance et consommez-la en début d'apéro, là où votre palais risque d'être bien frais. De plus, c'est habituellement à ce moment que votre faim commence à vous tenailler. Vos sens de l'odorat et du goût devraient donc être en état d'alerte maximal.

Avez-vous utilisé un verre adéquat?
Une bière d'inspiration belge, à la gazéification très active (au-delà de 3 volumes de CO2), ne se comporte pas aussi bien lorsqu'elle est servie dans un verre à la base trop étroite, devenant furieusement mousseuse. D'autres bières, à la gazéification douce, deviennent plate rapidement dans un verre trop évasé (un calice, par exemple). 

Solution facile: se munir de verres INAO et ensuite verser tranquillement afin de témoigner de la vitesse à laquelle la mousse se forme.


Avez-vous versé toutes les levures dans le verre?
Certains types de bière demandent à être servies avec la lie (la Weissbier allemande, par exemple). D'autres gagnent en raffinement si on laisse décanter la levure en réfrigérant la bouteille en position debout pendant plusieurs heures avant de l'ouvrir. Un trop plein de levures dans le verre pouvant masquer certaines subtilités de la bière, vaut mieux procéder avec caution avec une bière qui est supposée être si géniale.

Solution facile: versez tranquillement votre bière dans le verre en observant non seulement la formation de mousse, mais aussi la clarté du liquide. Lorsque les levures commencent à couler dans le verre, arrêtez immédiatement de verser. Vous pourrez toujours les rajouter par la suite une fois avoir goûté au résultat sans levures.

Avez-vous servi la bière à une température qui la met en valeur?
On sait tous qu'une bière trop froide peine à libérer ses propres arômes et qu'une bière trop chaude peut paraître plus lourdasse qu'elle l'est à température optimale. S'agit de prévoir son coup un peu, surtout si nous sommes en présence d'un supposé grand cru!

Solution facile: avoir un petit cellier à température contrôlée ou sortir votre bière du réfrigérateur une bonne demie-heure avant de la servir.

Aviez-vous bu une bière tout juste avant? Si oui, était-elle d'intensité similaire ou plus relevée?
Une mauvaise séquence en dégustation peut réduire un grand cru potentiel en bière dont on ne se souviendra presque pas le lendemain. Il est donc important de penser au positionnement de cette bière en dégustation afin de lui donner les meilleures chances de réussir. 


Solution facile: ne procédez pas par incréments d'intensité. Votre palais ne ferait que s'habituer au niveau d'intensité de la bière précédente et vous risquez de percevoir la bière du moment comme étant beaucoup plus délicate qu'elle ne l'est vraiment. Faites donc vos dégustations en vous assurant que chaque nouvelle bière suit une bière qui lui était passablement différente. Vous venez de boire un Stout bien charnu? Vous pouvez passer, après vous avoir rincé le palais, à une Saison, une brune sure, etc. Bref, à une bière qui ne jouera pas dans les mêmes plate-bandes gustatives (sucrées, rôties, amères) du Stout. Elle se démarquera plus facilement ainsi.

Est-ce que votre échantillon était de volume suffisant pour le type de bière en question?
Une bière à intensité relevée ne nécessite pas un grand nombre de gorgées avant de pouvoir identifier ses flaveurs dominantes, mais une bière délicate, telle une Kölsch, une Bitter, une Tmavy, mérite de grandes gorgées puisqu'elle est conçue pour ne révéler ses nuances que petit-à-petit tout en étanchant la soif. Il serait injuste de juger une telle bière en s'y trempant les lèvres que deux ou trois fois.

Solution facile: en dégustation avec des amis, assurez-vous que vous avez un volume respectable pour chaque bière en fonction de son intensité. 660ml de Double IPA peut bien servir à 6-7 personnes, mais la même quantité d'une Helles ne devrait pas être séparée en bien plus que 3-4 personnes. 

Aimez-vous vraiment tous les styles de bière?
La question qui tue, hein? Soyez conscients que la bière possède l'éventail de flaveurs la plus vaste de tous les alcools de la planète. De chocolat à vinaigre de vin, de conifères aux fleurs, presque tout est possible grâce au merveilleux amalgame de malts, houblons, eau et levures. Se peut-il que vous n'aimez tout simplement pas quelques arômes dans la bière en question? Personne ne nous oblige à tout aimer de toute façon, n'est-ce pas?

Tout compte fait, il est évidemment possible qu'une bière réputée ne vous plaise pas et que la responsabilité repose sur le détaillant qui entrepose le tout ou sur la brasserie qui conçoit la dite bière. Mais au moins, au moment fatidique, si vous avez pris soin de vous offrir une expérience gustative optimale, vous serez mieux armés pour déterminer la raison avec laquelle la dite bière est si appréciée... des autres. ;) 

1 commentaire:

Yodi25 a dit…

Merci pour la mention des verres INAO ! Je connaissais leur utilisation pour le vin, mais je ne savais pas qu'ils étaient également utiles pour la bière. Je vais m'en procurer pour mes prochaines dégustations.